Lors du débat sur la Stratégie éducative du ministère allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ) qui a eu lieu à Berlin le 11 mai dans le cadre du XIII e Congrès des universités populaires allemandes (Volkshochschultag), Marcela Ballara représentait le Réseau d’éducation populaire entre Femmes d’Amérique latine (Red de Educación Popular entre Mujeres REPEM), ainsi que le Conseil international d’éducation des adultes. De par ses activités de coordination au sein du bureau genre et éducation du CIEA (GEO) émané du programme pour les femmes mis en place peu après la création du Conseil, elle jouit d’une solide expérience. Le GEO a permis d’approfondir ce programme du fait que trois importants réseaux féministes ont participé à sa création: REPEM, FEMNET (Réseau du développement et de la communication des femmes africaines) et DAWN-South-East Asia (Alternatives pour le développement avec les femmes à l’aube d’une ère nouvelle). La mission du GEO consiste à intégrer la dimension genre dans le secteur de l’éducation des adultes, à garantir le respect du droit des femmes à l’apprentissage tout au long de la vie et à la participation en tant que citoyennes actives. Le monitoring et le suivi des accords internationaux sur le genre, l’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie, et l’intégration du genre dans différents espaces mondiaux et régionaux tels que l’UNESCO, le Forum social mondial, le Forum éducatif mondial, les Conférences des Nations unies et les campagnes mondiales, font partie des objectifs poursuivis par Marcela Ballara pour le compte du GEO.
En réaction à la présentation de la Stratégie éducative du ministère allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ), elle a fait remarquer qu’en dépit de ses louables intentions, le document ne contient «Pas d’analyse de genre ni d’approche axée sur le genre». Étant donné son expérience en matière de suivi des déclarations et des accords politiques, elle estime que ceci est une question cruciale. Il ne suffit pas de se donner implicitement pour objectif l’égalité entre les sexes, l’accès à l’apprentissage pour les filles et l’amélioration de la situation des filles et des femmes dans la société. Il faut expliciter ces objectifs en détail afin de les mettre en exergue et de donner aux gouvernements la responsabilité de leur mise en œuvre.
Mme Ballara regrette également qu’aucune attention particulière ne soit accordée à l’éducation des adultes et à l’apprentissage informel. Elle estime que le concept d’apprentissage tout au long de la vie présenté dans le document straté-gique devrait définir les besoins des adultes avec plus de précision. Elle considère le besoin d’apprentissage des adultes tenant compte de l’égalité entre les genres dans le contexte latino-américain, qui est sans doute similaire à celui des autres régions dans lesquelles le BMZ promeut l’éducation. Son analyse et ses conclusions abordent de nombreux aspects qui devraient être pris en compte avec plus de précision dans le document stratégique. Elle soutient que seuls les objectifs et les plans clairement définis seront intégrés dans les plans d’action, budgétés et mis en œuvre, et pourront mener à des résultats.
Nous présentons ci-après l’exposé qu’elle a préparé dans le cadre du débat.
Après la célèbre Conférence de Beijing sur les femmes en 1995, la communauté internationale a fait des compromis en matière d’égalité des genres dans l’éducation. Cinq ans plus tard, la Déclaration mondiale sur l’Éducation pour tous (EPT) et les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ont réaffirmé que l’éducation est un droit humain fondamental. Les pays ont reconnu le fait que l’éducation des filles est la première étape vers l’obtention de cet objectif, et qu’elle est aussi importante que nécessaire. La parité entre les genres dans l’enseignement primaire et secondaire a été prise en compte dans les objectifs de l’EPT et les OMD afin que la scolarisation des filles soit égale à celle des garçons.
Selon les récentes données de l’UNESCO, plus de la moitié des pays d’Amérique latine (22 sur 36) ont réussi à réaliser la parité entre les genres dans l’enseignement primaire en 2008. Au niveau secondaire, ceci n’est vrai que dans certains cas. Et au niveau supérieur, on constate une admission progressive des femmes dans les établissements d’enseignement supérieur.
En Amérique latine, les niveaux éducatifs sont polarisés; certains groupes se caractérisent encore par des taux élevés d’illettrisme alors que certains autres groupes sociaux ont amélioré leur niveau éducatif de manière significative au cours des dernières décennies. Les clivages sont importants, plus particulièrement en ce qui concerne les différences entre pauvres et non pauvres. Cette situation pose un problème sérieux en termes de développement économique, car elle est l’expression d’une injustice sociale.
Ceci se reflète plus particulièrement dans le secteur rural, qui affecte directement l’accès des femmes à l’emploi.
D’une manière générale, le REPEM considère qu’en Amérique latine, l’éducation des adultes et le genre se heurtent aux problèmes suivants:
Marcela Ballara, Karin Jahr de Guerrero
Source: Heidi Scherm
L’un des principaux obstacles auxquels se heurtent les femmes pour participer à des activités éducatives est le manque de temps. Leur rôle reproducteur, producteur et communautaire leur interdit de participer activement aux activités de formation, d’autant plus lorsqu’elles ont lieu aux heures pendant lesquelles elles accomplissent leurs principaux rôles. Les femmes sont surchargées de travail; si l’on veut que les activités de formation soient suivies avec assiduité et transforment la vie des femmes, il faut qu’elles aient lieu à des heures où celles-ci sont disponibles et qu’elles soint étayées par des de mesures d’acccompagnement, comme par exemple des gardes d’enfants pendant les cours.
En Amérique latine, l’éducation des adultes tenant compte de l’égalité entre les genres fait face à plusieurs défis: